Je débarque seul à Bastia n'ayant pû trouver de compagnon. Je laisse
mes affaires en consigne chez des amis et prends un taxi pour Haut
Asco (tarif très élevé car 70 km). La route d'Haut Asco est sèche et
je me retrouve à la nuit tombée dans le refuge avec 20 étudiant(e)s
Erasmus de Corte qui font la fiesta avec raclette, sono, téquila
paf, vodka etc. L'ambiance est super, çà commence très fort mais pas
comme je l'imaginais. J'aime ces montagnes du Sud.
22 Mars
Nuit très longue d'une heure ou deux, je file voir les fameuses
faces nord de ce cirque. Effectivement c'est splendide, les laricio
le sont tout autant. Je monte en crampons sur les pentes expos, le
sac est bien lourd et je finis de digérer de la fiesta. Enfin vers
2100m, bon ski jusque sous la pointe des Eboulis où 2 plaques de
croute glace me donnent un peu de fil à retordre avec mes crampons
alu et mon piolet rando.
Je retrouve un groupe qui vient du sud et qui file au Cintu (Cinto)
par l'arête en aller-retour. Je les suis, on finit ensemble, ce
n'est pas si facile, la neige botte, y'à de la glace près des
rochers. Paysages splendides.
Je descends à la brèche de Crucetta (Crucette), et je chausse les
crampons dans du 45° béton expo avec un sac de 20kg. Ca entraine...
La brèche est passée par une petite corniche. Ouf, fin des
difficultés, je descends sur Tighjettu (Tijiette) où je suis seul.
Bon repas et DODO.
23 Mars
Descente sur les bergeries à 1400m où il faut déchausser pendant
1h30. çà fait long mais la beauté des laricio et des torrents
traversés compense la lourdeur du sac. Ensuite montée au col "Bocca
di Foggiale". Je pensais que c'était tranquille mais c'est encore
bien expo et rechaussage de crampons dans du 40-45 expo. Je retrouve
de l'autre côté un piéton corse, je continue à l'épaule de la Paglia
Orba. Je téléphone au gite du col de Vergio mais celui-ci me dit que
c'est fermé car tout est en travaux cette année. Il me dit qu'il
reste les bergeries de Radule ou d'autres loin après le col (après
coup, il existe bien un refuge au col). Je délaisse la Paglia et
file aux bergeries de Radule. Elles sont superbes, il y a une seule
place sur le béton. On dirait que le berger est parti précipitamment
(bacs remplis de lait depuis 6 mois, salle blanche contenant 115
fromages complètement pourris sur 120 !). Je prends 2 fromages au
"fort caractère" et déguste mes pastas.
24 Mars
Un fort coup de vent est annoncé, je décide de faire du stop sur la
route au fer à cheval pour économiser de la distance et arriver à
destination avant la perturbation. La 3° voiture en 2 heures me
prends, ouf! (merci à eux), j'étais presque prêt à stopper de force
une voiture. A la maison Poppaghia (popaia), je rencontre de
sympathiques gardes de l'ONF qui me prédisent de bonnes choses. Aux
bergeries de Colga, le temps tient, je file vers les bergeries de
Vaccaghia mais le mauvais me rattrape sur le lac de Nino. Le vent
est très très fort mais dans le dos (il y aura des rafales mesurées
à 93 noeuds - 180km/h- au cap Corse ce matin), la visibilité
réduite. Le GPS m'aide à sortir du plateau, je reste très concentré,
faut pas faire d'erreur et j'arrive aux bergeries de Vaccaghia.
L'intérieur est top (matelas, gazinière, cheminée avec du bois,
nourriture et alcool !!), le temps exécrable dehors, je reste ici et
réussis à me sécher. Assurément, un des plus beaux refuges que j'ai
fréquenté.
25 Mars
Je ferais bien grasse matinée, mais le vent est complètement tombé
au petit matin et il fait grand beau. Allez je file vers Manganu
(Mangano) enfoui sous 2m50 de neige à 1600m. Ensuite, la brèche de
Capitellu (Capitello), l'arête en partie en crampons (trop expo à
skis avec un gros sac et la fatigue). Au col au dessus du lac Mélu
(Mélo), je rencontre un skieur qui vient de la Restonica. Il me
renseigne sur la météo et je file en crampons sur les pentes NW
verglacées. Au col 2200m, je monterai bien à la Maniccia (Manitche)
mais en 5 minutes le vent, le froid et les nuages arrivent ! A
13h30, je descends S.E sur des pentes presque béton, arf! Je suis
quelques traces et arrive tranquille au refuge de Pietra Piana.
Super, la pression est retombée car maintenant, même s'il fait
mauvais pendant 3 jours, je descendrai du bon côté de la vallée et
ne me retrouverai pas dans quelque vallée perdue au dessus
d'Ajaccio. Au refuge, je trouve un randonneur qui a fait la Maniccia
et le Rotondu (Rotondo) ce jour en crampons.
26 Mars
Grand beau, dur de se lever. Aujourd'hui c'est un grand jour car je
n'ai que les affaires de la journée dans le sac à dos. Je file à 10h
pour les versants SE de la Maniccia sous une grosse chaleur, gros
contraste avec hier. Au sommet, j'enquille le petit couloir nord en
super conditions qui me permet de filer vers le Rotondu. La fin du
Rotondu est à pied,la glace apparait sur les 20-30 derniers mètres
car c'est un peu tard. Je laisse un biscuit découpé aux 3 choucas
qui tournoient au dessus de moi. Ils me remercient pas quelques
preep ou weeoo. La descente est top, remontée à la Maniccia et
descente en 5 minutes à fond du sommet au refuge. Nous passons
l'après-midi à allumer le poêle avec des buches, un piolet aiguisé
pour couper des branchettes, etc. On réussit mais bien
difficilement.
27 Mars
La journée est annoncée assez belle avec du vent fort juste dans la
nuit. Mais le vent n'arrive que le matin, 80km/h. Au refuge, il est
facile de prévoir le vent: "on entend le vent" = 60km/h, "la porte
s'ouvre" = 70km/h, "les tôles tapent" = 80km/h, "les tôles volent" =
100-120km/h. L'après-midi le vent faiblit, mais la fatigue aidant,
on reste vautrés avec le poêle qui ronronne.
28 Mars
Le mauvais est annoncé mais il a du retard. Nous filons vers le
refuge de l'Onda (Onde). Enfin, je foule les très esthétiques crêtes
de Pinzi Corbini. Arrivé à l'Onda, on rencontre 3 randonneuses,
faisant l'aller retour au refuge. Elles nous offrent du champagne et
une tartelette à la fraise!, en raison de l'anniversaire de l'une
d'elles. La météo est prévue exécrable ensuite, je laisse le
randonneur qui dormira ce soir et surement demain à ce refuge. Je
monte illico presto au col de Muratello à droite du Monte d'Oro, le
mauvais arrive, viiiiiite. Au col descente illico tant qu'il n'y a
pas de brouillard. Enfin je déchausse à 1400m et continue à pied
vers Vizzavona (Vizzavone). La grosse pluie annoncée et le redoux
arrivent finalement 1h après mon passage au col. Je descends sous
les cordes jusqu'à la gare désertée puis Corte et Bastia/ le
continent plus tard.
C'est passé, ric-rac, mais c'est passé, comme à l'image de toute la
semaine. Un de mes plus beau et plus exaltant raid..